Brexit
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Depuis le 1er février 2020, le Royaume-Uni n’est plus membre de l’Union européenne (UE). C’est la fin de soixante-cinq ans d’une politique britannique peu glorieuse à l’égard de la construction européenne, qui a eu pour nom successivement le mépris, puis l’envie, puis l’imploration, puis l’entrisme, puis l’exception, puis la défiance.

Ceci n’exonère cependant pas les Continentaux de toutes responsabilités dans ce regrettable divorce. S’ils avaient maintenu leur club plus attrayant, l’Angleterre n’en serait peut-être pas partie. Désormais les 27 pays membres sont confrontés à une alternative simple : renforcer l’efficacité de l’UE dans la protection de ses citoyens ou accepter qu’elle se délite progressivement, jusqu’à la mort. Les peuples européens souhaitent à raison une Union qui les protège de trois phénomènes invasifs, jusqu’à présent quasi-incontrôlés : les migrations, l’expansionnisme commercial chinois, la prétention de l’Amérique à leur imposer son droit.

On oublie souvent que le fameux accord de Schengen, signé en 1985 par cinq membres de la Communauté européenne (Allemagne de l’Ouest, France, Benelux) ne prévoyait pas seulement une suppression des contrôles à leurs frontières communes. Il ambitionnait aussi une surveillance plus efficace de leurs frontières extérieures. Aujourd’hui les citoyens de l’Espace Schengen ( 26 Etats européens) se félicitent de pouvoir voyager d’un Etat à l’autre sans contrôle. Sur le plan universitaire, le programme Erasmus a été immense succès. Mais la promesse d’un contrôle plus étroit des frontières extérieures n’a pas été tenue. La diplomatie européenne, incarnée par le Service européen pour l’action extérieure (4200 employés, 700 millions d’euros de budget), s’est montrée incapable d’anticiper la crise migratoire de 2015, alors que les révolutions dans les pays arabes avaient commencé en 2011. L’agence européenne Frontex de garde-frontières et garde-côtes n’a pas été renforcée à temps.

Aujourd’hui, les frontières de l’Union européenne ne sont toujours pas hermétiques. Or, dans leur écrasante majorité, les citoyens européens veulent passer d’une immigration subie à une immigration choisie. Intimidés par les ONG, les Etats européens et Frontex ne font pas ce qu’il faut. Le droit d’asile devrait être réservé aux étrangers politiquement persécutés dans leurs pays parce qu’ils y défendent les valeurs européennes. C’est à juste titre que l’avocate iranienne Shirin Ebadi a obtenu son statut de réfugié dans l’UE : elle a réellement risqué sa vie pour défendre les droits de l’homme dans son pays. Mais aujourd’hui le droit d’asile est massivement détourné, pour être utilisé par des filières de trafiquants, qui organisent vers l’Europe l’immigration économique illégale de jeunes hommes, à partir des pays pauvres d’Asie centrale, du Moyen-Orient, du Maghreb et d’Afrique noire. Et l’Europe n’a ni les moyens économiques, ni la volonté démocratiquement exprimée, d’accueillir chez elle toute la misère du monde.

L’UE s’est, sans réelle contrepartie, laissée envahir par les produits manufacturés chinois. Elle n’a pas su protéger ses champions industriels, comme Alcatel, face à la concurrence inéquitable des Chinois et face à leurs vols de propriété intellectuelle. Dans le domaine de l’intelligence artificielle et des réseaux 5-G, s’annonce une guerre économique et technologique impitoyable entre les Etats-Unis, la Chine et l’Europe. Dans la 5-G, l’Europe n’est pas mal placée, détenant 56% des brevets, contre 30% pour la Chine et 13% pour l’Amérique. L’UE est désormais consciente qu’elle doit prévenir le pillage de ses données industrielles par les incessantes attaques cyber. Mais elle doit aller plus loin, pour être à la hauteur du match qui s’annonce. Elle doit créer des structures souples et efficaces à l’égal de l’agence américaine DARPA (Defense Advanced Projects Agency, 3,5 milliards de dollars de budget annuel), afin de faciliter l’innovation disruptive en Europe.

Enfin, il est grand temps pour l’Europe de lutter contre les excès de l’extraterritorialité du droit américain. Il n’est pas normal que des sociétés européennes comme Total ou Peugeot aient dû quitter l’Iran, pays où elles faisaient de belles affaires, simplement parce que l’Amérique est revenue sur son engagement d’honorer l’accord nucléaire de juillet 2015 et a décidé d’imposer unilatéralement un embargo à ce pays.

Dans un autre domaine, l’UE a commencé à se défendre. Face à la prédation des géants de l’internet américain (Google, Faceboook, Amazon, etc.), elle a sorti le RGPD (Règlement général sur la protection des données personnelles). Mais il lui reste à s’émanciper de la tyrannie du dollar dans les échanges internationaux.

La renaissance de l’UE à 27 ne se fera que si elle reprend en main son destin en matière migratoire, industrielle et juridique.

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