xi jiping
Crédit photo : GREG BAKER/AFP

Confronté à la persistance du mouvement de masse pro-démocratie au sein de la « région administrative spéciale » de Honk-Kong, le tout-puissant président chinois ne sait pas bien quoi faire. Trois options se présentent à Xi Jinping, mais elles sont toutes les trois mauvaises.

La première option est la répression militaire brutale, à l’exemple de celle qui ensanglanta, le 4 juin 1989, la place centrale de Pékin Tiananmen, alors investie par un seat-in pacifique d’étudiants réclamant l’avènement chez eux de la démocratie et des libertés civiles. Cette action militaire ne pose aucune difficulté technique mais elle emporte de considérables risques géopolitiques.

En 1989, les Occidentaux avaient sanctionné la Chine, en lui imposant un embargo militaire, qui tient toujours aujourd’hui. Puis ils avaient rapidement oublié le massacre de Tiananmen, tout esbaudis qu’ils étaient par la croissance à deux chiffres de l’industrie de l’Empire du Milieu, qu’ils qualifièrent bientôt d’« atelier du monde ». En 2001, ils l’avaient même fait entrer dans l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), sans prévoir que la Chine saisirait pour elle tous les avantages du libre-échange, sans en accorder aucun à ses partenaires commerciaux occidentaux, qui étaient pourtant désireux d’implanter chez elle leurs banques et leurs compagnies d’assurance. Bien que constatant qu’elle n’appliquait aucun Etat de droit chez elle, les Occidentaux avaient eu la naïveté de croire que la Chine appliquerait scrupuleusement la légalité internationale.

Mais les Occidentaux ne sont plus aujourd’hui dans les mêmes bonnes dispositions, qu’ils montraient, au début des années 2000, à l’égard du pouvoir autocratique chinois. Depuis le discours très ferme du président Trump à Davos en janvier 2018, ils ne tolèrent plus le vol de leurs technologies par la Chine. Géopolitiquement, ils n’admettent pas que la Chine ait accaparé les eaux de la Mer de Chine méridionale (un territoire maritime équivalent à la Méditerranée), au mépris du droit international de la mer. Ils sont prêts à vendre des armes à tout pays asiatique osant rester debout face à la Chine, quand bien même aurait-il été naguère, tel le Vietnam, leur virulent ennemi.

Pour toutes ces raisons, prendre l’option militaire serait aventureux pour la Chine. Son économie accuse déjà le coup des droits de douane punitifs décrétés sur ses produits à l’entrée des Etats-Unis. En cas de coup de force à Hong Kong et donc de violation de l’esprit du traité qu’elle signa en 1997 avec les Britanniques – « un pays, deux systèmes » -, elle risquerait un embargo beaucoup plus général.

La deuxième option est celle de jouer le pourrissement. C’est-à-dire de reprendre la stratégie qui avait si bien marché en 2014. A cette époque, la révolte estudiantine « des parapluies », qui cherchait à renforcer la démocratie dans la désignation de l’exécutif de Hong Kong, s’était éteinte progressivement, faute de combattants. Le problème aujourd’hui est que la révolte a gagné toutes les classes sociales et toutes les corporations, à l’exception des triades mafieuses, toujours prêtes à rendre un petit service à Pékin. Et les sept millions de résidents de Hong-Kong n’ont pas l’air de vouloir baisser les bras.

La troisième option eût été de saisir l’occasion pour réformer le système du parti communiste chinois et installer un véritable Etat de droit en Chine. Mais Xi Jinping n’est pas l’homme de cette tâche. Il a, depuis sa jeunesse, trop intériorisé la ligne du parti. Durant la Révolution culturelle, il était resté du côté des Rouges, alors même qu’ils persécutaient son père injustement. Plus tard, alors qu’il avait conquis la magistrature suprême, il fit sauter la clause prise après la mort de Mao, qui limitait à deux mandats de cinq ans le pouvoir du président.

Xi Jinping sait-il que les autocraties finissent toujours mal ? Comprend-il que les grands hommes révérés par l’Histoire ne le sont jamais pour leur pouvoir personnel, mais pour le legs à leur pays d’institutions fortes et durables, à l’instar des Washington, des Disraeli ou des de Gaulle ? C’est probable car c’est un homme averti. Mais il peut également être aveuglé par le désir de positionner son pays comme première puissance incontestée de la planète d’ici 2049, afin de fêter fastueusement le centième anniversaire de l’arrivée au pouvoir du parti communiste chinois. Il ne serait pas le premier homme intelligent à avoir été détruit par l’ubris, cet esprit de démesure, déjà stigmatisé par l’historien grec Thucydide…

L’exemple de la Russie inspirera-t-il Xi ? En faisant couler le sang au Donbass, le Kremlin a perdu l’Ukraine. Si la Chine soumet demain Hong Kong par la force, elle perdra définitivement Taïwan. La prise d’un gage immédiat engendre souvent un recul stratégique.

Un commentaire sur « L’autocratie chinoise a-t-elle un avenir ? »

  1. Très bon article.
    Je note toutefois quelques facilités (bien courantes dans la presse française) qui tendent à simplifier l’analyse. Il n’y a jamais 7 millions de Hong Kongais qui défient Pekin mais seulement une partie. A l’heure actuelle, je doute mem que cette partie de la population anti Pékin soit majoritaire.

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